Cannabis : En Europe, il y a autant de lois que de pays

Détention et consommation sont plus ou moins sanctionnées. Cependant, on considère de moins en moins les consommateurs comme des criminels
En Estonie, un consommateur de cannabis s’expose à des poursuites pénales s’il en détient une quantité à même d’intoxiquer dix personnes – soit vingt grammes de marijuana et dix grammes de haschich, précisent les circulaires. En République tchèque, il risque les ennuis pour moins que cela : à partir de quinze grammes pour la marijuana et de cinq pour le haschich, selon un décret gouvernemental.
En Allemagne, les instances judiciaires locales peuvent entamer des poursuites dès lors que la quantité détenue est jugée « signifiante » – à chacun des Länder d’apprécier, dit la Cour constitutionnelle.
« Le statut légal du cannabis pour l’usage personnel est l’une des questions de politique publique les plus controversées au sein de l’Union européenne (UE), indique l’Observatoire européen des drogues et des toxicomanies, basé à Lisbonne (…). Au niveau national, les mesures de contrôle varient considérablement. »
Sur le papier, chacun des Vingt-Sept a ratifié deux conventions internationales, datant de 1961 et 1988, leur imposant d’incriminer la production, le trafic, la cession et la détention de stupéfiants, dont le cannabis. Mais « l’obligation d’incriminer directement l’usage n’est prévue par aucune norme de droit international », précise une note d’octobre 2011 réalisée par l’Observatoire français des drogues et des toxicomanies, portant sur l’état des lieux en Europe des législations relatives au cannabis.
Les situations sur le Vieux Continent sont ainsi presque aussi nombreuses que les États membres. En Grèce, en Suède ou à Chypre, fumer du cannabis est un délit et conduit devant les tribunaux. En Espagne, la sanction se résume à une amende.
Partout, en revanche, la détention est punie devant les juridictions pénales (aux Pays-Bas, comme en Italie ou en Espagne, des mécanismes permettent de ne pas sanctionner la détention de « petites quantités »). Mais le seuil de déclenchement des poursuites varie selon les quantités.
Voilà pour le volet légal. « Il y a aussi ce qui se passe dans la rue, qui est encore différent », indique Brendan Hughes, analyste scientifique à l’Observatoire européen.
Celui-ci relève néanmoins une tendance de fond commune en Europe, qui concerne toutes les drogues : « Depuis dix ans, la plupart des pays se mettent à considérer les consommateurs non comme des criminels, mais comme des malades. »
C’est au Portugal que le renversement de perspectives est le plus abouti, le pays ayant adapté sa législation. Depuis le vote d’une loi, en novembre 2000, achat, détention et consommation de drogue sont décriminalisés. Cannabis, héroïne, cocaïne… Le texte ne fait pas de distinction entre les substances.
En deçà de certaines doses – 5 grammes pour le haschisch –, le consommateur est considéré comme un toxicomane et non comme un criminel.
En cas d’interpellation, il doit faire face à une « commission de dissuasion » composée d’un médecin, d’un avocat et d’un travailleur social. Celle-ci peut le déclarer « consommateur ludique » et lui imposer une amende ou des travaux d’intérêt général. Elle peut aussi le considérer comme toxicomane et, dans ce cas, l’orienter vers un traitement.
Ainsi le Portugal se félicite-t-il d’avoir atteint l’objectif de son « plan national contre les drogues et les addictions » , à savoir la réduction de la consommation. Toutes substances confondues, celle-ci est en moyenne passée de 44,2 % en 2001 à 31 % en 2007.
Pour ce qui concerne le cannabis, le pays en est désormais l’un des moins consommateurs en Europe, avec 12 % de la population, contre 30 % au Royaume-Uni et près de 40 % au Danemark.
MARIANNE MEUNIER  Source : Lacroix

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